Les énergies vertes en 2025 : tout ce qu’il faut savoir

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“L’avenir appartient à ceux qui maîtriseront les énergies propres.” Cette phrase, prononcée lors de la COP26 à Glasgow, résonne aujourd’hui comme une évidence dans un monde en pleine métamorphose énergétique. En l’espace d’une décennie, les énergies vertes sont passées du statut d’alternatives coûteuses et marginales à celui de piliers incontournables de l’avenir énergétique de plusieurs pays dans le monde. Portées par l’urgence climatique, l’innovation technologique et la chute vertigineuse des coûts, elles bouleversent les équilibres établis depuis la révolution industrielle.

En 2023, pour la première fois de l’histoire moderne, les investissements mondiaux dans les énergies propres ont dépassé ceux consacrés aux énergies fossiles. Ce basculement historique marque-t-il le début d’une nouvelle ère ? Entre opportunités économiques, défis techniques et enjeux sociaux, décryptage d’une révolution verte qui transforme notre rapport à l’énergie et redessine les contours de la géopolitique mondiale.

Qu’est-ce qu’une énergie “verte” ?

Le terme “énergie verte” désigne les sources d’énergie dont l’exploitation génère peu ou pas d’émissions de gaz à effet de serre et dont l’impact environnemental est limité. Si cette définition semble simple, elle cache une réalité plus complexe.

Il existe une nuance entre énergies vertes, renouvelables, propres et décarbonées, explique Jean-François Carenco, ancien président de la Commission de régulation de l’énergie. Les énergies renouvelables se régénèrent naturellement à l’échelle humaine, comme le solaire ou l’éolien. Les énergies décarbonées, quant à elles, émettent peu de CO₂, ce qui peut inclure le nucléaire.

L’appellation “verte” fait référence à la fois à leur faible impact carbone et à leur caractère naturel et durable. Toutefois, cette terminologie n’est pas exempte de débats, notamment concernant l’inclusion ou non du nucléaire dans cette catégorie.

Les différentes formes d’énergies vertes

Le solaire : la ressource la plus abondante

L’énergie solaire se décline principalement en deux technologies : le photovoltaïque, qui transforme directement les rayons du soleil en électricité, et le solaire thermique, qui exploite la chaleur du rayonnement solaire.

Selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE), la capacité solaire mondiale a atteint 1 800 gigawatts (GW) en 2024, avec une augmentation de 29 % par rapport à 2023. La Chine domine le marché avec 710 GW, suivie par les États-Unis 170 GW et l’Union européenne.

L’éolien : la maturité technologique

Les éoliennes terrestres et offshore captent l’énergie du vent pour produire de l’électricité. L’éolien offshore, bien que plus coûteux à installer, bénéficie de vents plus forts et plus constants.

L’éolien est devenu l’une des sources d’électricité les moins chères au monde, souligne Henrik Andersen, PDG de Vestas, leader mondial des turbines éoliennes. La capacité éolienne mondiale dépassait 1200 gigawatts (GW) fin 2024, avec le Royaume-Uni en tête pour l’offshore et la Chine pour le terrestre.

L’hydraulique

L’énergie hydraulique reste la première source d’électricité renouvelable mondiale, représentant environ 14% de la production électrique globale en 2024. Les grands barrages côtoient désormais des installations plus modestes comme les centrales au fil de l’eau ou les systèmes de micro-hydraulique.

Dans des pays comme la Norvège ou le Brésil, l’hydraulique fournit plus de 60% de l’électricité nationale, démontrant sa fiabilité comme source principale d’énergie.

La géothermie : l’énergie des profondeurs

Exploitant la chaleur du sous-sol, la géothermie offre une production stable et continue, contrairement à d’autres énergies renouvelables intermittentes. L’Islande est exemplaire avec 25% de son électricité et 90% de son chauffage provenant de cette source.

Malgré son potentiel considérable, la géothermie ne représente que 0,3% de la production électrique mondiale, limitée par des contraintes géologiques et d’importants coûts initiaux.

La biomasse et le biogaz : l’économie circulaire énergétique

Ces technologies transforment des matières organiques (déchets agricoles, forestiers ou alimentaires) en énergie. Le biogaz, issu de la fermentation de matières organiques, peut être utilisé comme le gaz naturel conventionnel.

La biomasse permet de valoriser des résidus tout en produisant une énergie stockable et pilotable, explique Claire Tutenuit, déléguée générale d’Entreprises pour l’Environnement. En France, cette filière représente environ 60% des énergies renouvelables consommées.

Les avantages des énergies vertes

Une réponse à l’urgence climatique

Premier atout : la réduction drastique des émissions de CO₂. Selon le GIEC, pour limiter le réchauffement à 1,5°C, les énergies renouvelables devront fournir 70 à 85% de l’électricité mondiale d’ici 2050.

Une ressource inépuisable

Contrairement aux combustibles fossiles, les énergies vertes s’appuient sur des flux naturels virtuellement inépuisables à l’échelle humaine. Ce caractère renouvelable offre une perspective de durabilité inégalée.

L’autonomie énergétique

En diversifiant les sources et en permettant une production décentralisée, les énergies vertes réduisent la dépendance aux importations et renforcent la résilience des systèmes énergétiques nationaux.

Les défis à relever

Le coût des infrastructures

Malgré une baisse spectaculaire des coûts (80% pour le solaire depuis 2010).

Malgré ces réductions de coûts, la transition vers une énergie propre nécessite des investissements massifs. En 2024, les investissements mondiaux dans la transition énergétique ont atteint un record de 2,1 trillions de dollars, marquant une augmentation de 11 % par rapport à l’année précédente. Ce chiffre inclut les investissements dans les transports électrifiés (757 milliards de dollars), les énergies renouvelables (728 milliards de dollars), et les réseaux électriques (390 milliards de dollars), entre autres. La Chine a été le principal contributeur avec 818 milliards de dollars.

Cependant, selon BloombergNEF, pour atteindre les objectifs de zéro émission nette d’ici le milieu du siècle, les investissements annuels devraient tripler pour atteindre environ 5,6 trillions de dollars entre 2025 et 2030.

De plus, l’Agence internationale de l’énergie (AIE) souligne que, bien que les investissements dans les énergies propres aient augmenté, ils restent insuffisants.​

L’empreinte environnementale

Les énergies vertes ne sont pas exemptes d’impact écologique. L’extraction de terres rares pour les aimants d’éoliennes, la consommation d’eau pour certaines installations solaires thermiques ou l’impact des barrages sur la biodiversité soulèvent des questions.

L’intermittence : le talon d’Achille

La production solaire et éolienne fluctue selon les conditions météorologiques. Ce caractère variable nécessite de repenser complètement l’architecture des réseaux électriques, note Thomas Veyrenc, directeur exécutif de RTE.

Pour relever ce défi, plusieurs solutions sont envisagées :

  • Le stockage de l’énergie

Le développement de technologies de stockage, comme les batteries, permet de conserver l’énergie produite en excès pour l’utiliser lors des périodes de faible production.

Stocker l’électricité à grande échelle reste un défi technologique majeur. Batteries, hydrogène, stations de pompage-turbinage : chaque solution présente des avantages et des limites spécifiques.

Le développement massif des énergies renouvelables intermittentes rend crucial l’enjeu du stockage énergétique. Les batteries lithium-ion dominent actuellement le marché, avec une capacité mondiale qui a triplé entre 2019 et 2023.

L’hydrogène vert, produit par électrolyse de l’eau à partir d’électricité renouvelable, apparaît comme une solution prometteuse pour le stockage de longue durée.

L’hydrogène pourrait représenter 12% de la consommation énergétique mondiale d’ici 2050 si les politiques actuelles sont renforcées, estime l’Hydrogen Council.

  • Les réseaux intelligents ou “smart grids”

Les réseaux intelligents ou “smart grids” constituent également une réponse à l’intermittence, en optimisant en temps réel l’équilibre entre production et consommation. Ces systèmes pilotent désormais des millions d’objets connectés pour maximiser l’intégration des énergies vertes.

Une révolution inégale

La Chine domine le secteur avec 50% des investissements mondiaux dans les énergies renouvelables et une position hégémonique dans la fabrication des équipements.

En Europe, le Danemark se distingue particulièrement avec plus de 50% de son électricité issue de l’éolien.

L’Afrique : potentiel immense, défis considérables

Le continent africain bénéficie d’un potentiel solaire exceptionnel.

L’Afrique pourrait devenir l’Arabie Saoudite des énergies renouvelables, affirme Akinwumi Adesina, président de la Banque africaine de développement.

Des projets emblématiques émergent, comme la centrale solaire Noor au Maroc, l’une des plus grandes au monde, ou l’initiative Akon Lighting Africa qui a déjà fourni de l’électricité solaire à plus de 25 millions de personnes dans 25 pays.

Toutefois, les obstacles demeurent nombreux : accès limité aux financements, instabilité politique, manque d’infrastructures de réseau et de compétences techniques. Les investissements actuels, estimés à 30 milliards de dollars annuels, devraient tripler pour répondre aux besoins du continent.

Bien que l’Afrique contribue peu aux émissions mondiales de gaz à effet de serre, elle est particulièrement vulnérable aux effets du changement climatique. La transition énergétique est donc essentielle pour renforcer la résilience du continent face aux défis climatiques.

La transition vers les énergies renouvelables en Afrique n’est pas seulement une nécessité environnementale, mais aussi une opportunité économique et sociale majeure. Bien que les investissements initiaux soient importants, les bénéfices à long terme sont significatifs :​

  • Réduction des coûts énergétiques : Les énergies renouvelables deviennent de plus en plus compétitives par rapport aux sources d’énergie traditionnelles.​
  • Création d’emplois : Le développement des énergies renouvelables peut générer des millions d’emplois dans des secteurs variés tels que la construction, la maintenance et la gestion des infrastructures énergétiques.​
  • Amélioration de l’accès à l’énergie : Les systèmes décentralisés, comme les mini-réseaux solaires, peuvent fournir de l’électricité aux zones rurales isolées, améliorant ainsi la qualité de vie et les opportunités économiques.

Le business des énergies vertes

Le financement de la transition énergétique mobilise des acteurs variés. Les grandes banques de développement comme la Banque mondiale ou la BEI ont réorienté leurs portefeuilles vers les projets verts. Le secteur privé n’est pas en reste : les obligations vertes ont atteint 500 milliards de dollars d’émissions en 2023.

De nouveaux géants émergent dans ce secteur en pleine expansion. NextEra Energy aux États-Unis a dépassé ExxonMobil en capitalisation boursière en 2020, tandis que des entreprises comme Ørsted au Danemark ont complètement pivoté des fossiles vers les renouvelables.

Les startups innovantes captent également d’importants financements.

Les technologies de rupture dans le stockage ou les smart grids représentent le prochain eldorado pour le capital-risque, prédit Shayle Kann, investisseur chez Energy Impact Partners.

Quel avenir pour les énergies vertes ?

Les scénarios de l’AIE prévoient que les énergies renouvelables pourraient représenter jusqu’à 90% de la production électrique mondiale d’ici 2050 dans un scénario de neutralité carbone.

L’intégration des énergies vertes dans les villes intelligentes ouvre des perspectives fascinantes : bâtiments à énergie positive, mobilité électrique alimentée par des sources renouvelables, systèmes de chauffage et refroidissement urbains décarbonés.

Les technologies émergentes promettent d’accélérer cette révolution. L’intelligence artificielle optimise déjà la production et la distribution d’électricité renouvelable. La blockchain sécurise les transactions énergétiques décentralisées. Les nouveaux matériaux photovoltaïques comme les cellules pérovskites pourraient doubler l’efficacité des panneaux solaires.

La vraie question n’est plus de savoir si les énergies vertes domineront notre avenir énergétique, mais à quelle vitesse cette transformation se produira, conclut Fatih Birol, directeur exécutif de l’AIE.

Un constat qui résume l’ampleur du défi : concilier l’urgence climatique avec les réalités économiques, technologiques et sociales d’une transition sans précédent.

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