Les 10 technologies les plus innovantes de 2024 : comment la science prépare déjà le monde de demain

Publié le

Dans un monde où l’innovation technologique ne cesse de s’accélérer, certaines avancées se distinguent par leur potentiel à transformer radicalement nos industries et notre quotidien. Le Forum Économique Mondial a récemment identifié dix technologies émergentes qui promettent de redéfinir notre avenir. Plongée dans ces innovations qui façonnent déjà 2024.

1. L’IA au service de la découverte scientifique

 

L’intelligence artificielle ne se contente plus d’analyser des données : elle devient désormais un partenaire actif dans la recherche scientifique. Les systèmes d’IA avancés peuvent aujourd’hui formuler des hypothèses, concevoir des expériences et interpréter des résultats à une vitesse inatteignable pour les chercheurs humains.

“Nous assistons à une véritable révolution dans les laboratoires,” explique Marie Dupont, directrice de recherche au CNRS. “Des algorithmes comme AlphaFold ont déjà transformé la biologie moléculaire, mais ce n’est que le début. En 2024, l’IA accélère la découverte de nouveaux matériaux, médicaments et solutions énergétiques.”

Cette symbiose entre intelligence humaine et artificielle pourrait réduire considérablement le temps nécessaire pour développer des traitements contre des maladies complexes ou concevoir des matériaux aux propriétés inédites.

2. Technologies de protection de la vie privée

 

À l’heure où les données sont souvent qualifiées de “nouvel or noir”, les technologies de protection de la vie privée (Privacy-Enhancing Technologies ou PET) émergent comme une solution révolutionnaire pour résoudre le dilemme fondamental entre innovation numérique et confidentialité.

En 2024, les violations de données coûtent en moyenne 5,2 millions d’euros aux entreprises européennes, selon le dernier rapport de IBM Security. Cette pression financière, combinée aux exigences réglementaires croissantes, a catalysé l’adoption rapide des PET dans de nombreux secteurs, notamment la finance, la santé et les télécommunications.

Dans un monde où l’IA et le big data dominent, la question de la vie privée et de la souveraineté des données est cruciale. Des techniques émergentes rendent possible la coopération autour de données protégées. Par exemple, la génération de données synthétiques – des jeux de données artificiels qui imitent les tendances statistiques des données réelles sans contenir d’informations personnelles – facilite le partage à grande échelle sans compromettre la confidentialité​.

Le chiffrement homomorphe, les calculs multi-parties sécurisés et l’apprentissage fédéré transforment la manière dont les organisations partagent et analysent les informations. “Ces technologies représentent un changement de paradigme,” affirme Jean Lefort, analyste chez Gartner. “Elles permettent de tirer parti de la valeur des données sans compromettre la confidentialité des individus.”

Dans un contexte réglementaire de plus en plus strict, ces innovations offrent aux entreprises la possibilité de collaborer sur des ensembles de données sensibles tout en respectant les normes comme le RGPD.

Des cas d’usage concrets qui transforment les industries

En 2024, plusieurs secteurs ont franchi le cap de l’expérimentation pour déployer les PET à grande échelle :

  • Finance : partage de renseignements sans compromis

Le secteur bancaire utilise désormais les calculs multi-parties sécurisés pour détecter les fraudes transfrontalières. “Nous pouvons identifier des schémas suspects impliquant plusieurs institutions sans jamais révéler qui sont nos clients ou quelles transactions ils effectuent,” explique Jean-Marc Bonnefous, responsable sécurité financière chez Société Générale.

Les résultats sont impressionnants : selon l’Association Bancaire Européenne, les systèmes basés sur les PET ont permis d’augmenter de 64% la détection de réseaux frauduleux complexes au premier trimestre 2024.

  • Santé : recherche collaborative et diagnostics avancés

La recherche pharmaceutique adopte massivement l’apprentissage fédéré pour développer des traitements plus efficaces. Le consortium Pharma.AI, regroupant cinq géants pharmaceutiques et douze centres de recherche, a lancé en mars 2024 une plateforme permettant de développer des biomarqueurs plus précis tout en laissant les données cliniques sous le contrôle strict des hôpitaux participants.

“Nous pouvons désormais exploiter des cohortes de patients beaucoup plus larges et diversifiées,” se félicite le Dr. Helena Krüger de Novartis. “Cela accélère considérablement le développement de thérapies ciblées, particulièrement pour les maladies rares où chaque donnée patient est précieuse.”

3. Surfaces intelligentes reconfigurables

 

Les surfaces intelligentes reconfigurables (RIS) représentent une avancée majeure dans le domaine des télécommunications. Ces métasurfaces peuvent modifier électroniquement la propagation des ondes électromagnétiques, optimisant ainsi la couverture et l’efficacité énergétique des réseaux sans fil.

Cette technologie attire déjà de grands groupes télécoms et industriels : l’institut note que Huawei, Samsung, Intel, Nokia ou Rohde & Schwarz investissent dans les plateformes RIS, prévoyant une adoption exponentielle dans les années à venir​.

Cette technologie est particulièrement prometteuse dans les environnements présentant des défis de propagation des ondes (zones urbaines denses, bâtiments avec beaucoup de métal/béton, zones industrielles) et partout où l’efficacité énergétique et la sécurité des communications sont cruciales. En permettant de contrôler l’environnement électromagnétique avec une précision inédite, elles ouvrent la voie à des réseaux de communication plus performants, durables et sécurisés. Si leur déploiement reste encore limité en 2024, la convergence entre miniaturisation des composants, algorithmes d’intelligence artificielle et efforts de standardisation suggère que les RIS pourraient devenir, d’ici la fin de la décennie, aussi ubiquitaires que les antennes Wi-Fi aujourd’hui.

Les surfaces intelligentes reconfigurables peuvent permettre d’optimiser la couverture 5G/6G, d’améliorer l’imagerie médicale, de fiabiliser les communications dans les transports, d’étendre la portée des capteurs IoT, de protéger les communications sensibles et d’assurer une connectivité fiable dans l’industrie.

4. Stations plateformes à haute altitude

Positionnées dans la stratosphère entre 18 et 25 kilomètres d’altitude, les stations plateformes à haute altitude (HAPS) combinent les avantages des satellites et des infrastructures terrestres. Ces plateformes, qu’il s’agisse de ballons stratosphériques ou de drones solaires, offrent une connectivité à large bande dans des zones reculées ou mal desservies.

“Les HAPS représentent une solution médiane idéale,” explique Sarah Chen, analyste chez Morgan Stanley. “Contrairement aux satellites, elles peuvent être déployées rapidement et à moindre coût, tout en couvrant des zones bien plus vastes que les tours de télécommunication traditionnelles.”

En déployant des réseaux au-dessus des régions isolées, les HAPS pourraient créer un « pont vers l’avenir » : accès élargi à l’éducation en ligne, téléconsultations médicales, et développement économique local là où l’infrastructure terrestre est insuffisante​. Des projets comme Airbus Zephyr, Thales Stratobus ou Boeing Aurora illustrent l’investissement industriel. Le marché a atteint près de 783 millions de dollars en 2023 et devrait croître de plus de 10 % par an jusqu’en 2033.

5. Détection et communication intégrées

 

La convergence entre systèmes de communication et de détection marque une étape cruciale dans l’évolution des réseaux sans fil. Cette technologie, connue sous le nom d’ISAC (Integrated Sensing and Communication), permet d’utiliser les mêmes ondes radio pour transmettre des données et détecter des objets ou personnes.

“L’idée fondamentale derrière l’ISAC est d’une élégante simplicité,” explique Rima Khalil, directrice de recherche en télécommunications chez Nokia Bell Labs. “Plutôt que d’utiliser deux systèmes distincts — l’un pour communiquer des données et l’autre pour détecter des objets — nous utilisons les mêmes ondes radio pour accomplir les deux fonctions simultanément.”

Cette approche repose sur une utilisation plus sophistiquée du spectre radioélectrique, ressource naturelle limitée et de plus en plus saturée. Les mêmes signaux qui transportent voix, données et vidéos peuvent être analysés après réflexion sur l’environnement, révélant ainsi informations de distance, vitesse, position ou même composition des objets environnants.

“C’est comme si votre réseau Wi-Fi apprenait soudainement à ‘voir’ à travers les murs,” illustre Marc Dubois, chercheur à l’Institut Fraunhofer. “Les signaux qui rebondissent sur les objets ou les personnes portent une signature unique qui peut être interprétée algorithmiquement.”

Les applications sont nombreuses : véhicules autonomes plus sûrs, maisons intelligentes capables de détecter les mouvements sans caméras intrusives, ou encore optimisation dynamique des réseaux 5G et 6G en fonction de l’environnement.

Préoccupations liées à la vie privée

La capacité à “voir” à travers les murs ou à détecter des mouvements soulève d’évidentes questions éthiques et réglementaires. “Il est crucial d’établir un cadre clair pour l’utilisation de ces capacités de détection,” souligne Thomas Weber, juriste spécialisé en droit numérique. “La frontière entre service utile et surveillance invasive peut être ténue.”

Plusieurs fabricants développent actuellement des approches “privacy by design”, où les données de détection sont traitées localement et agrégées de manière à préserver l’anonymat des individus.

6. Technologies immersives pour la construction

La fusion entre monde physique et numérique transforme radicalement notre façon de concevoir, construire et habiter les espaces. Réalité augmentée, réalité virtuelle et jumeaux numériques permettent désormais de visualiser et d’interagir avec les bâtiments avant même leur construction.

L’immersion numérique (réalité virtuelle, réalité mixte) est l’un des vecteurs possibles de transformation. Les outils immersifs permettent aux architectes et ingénieurs de visualiser virtuellement un chantier, de détecter en amont des erreurs de conception ou de planifier des tâches avant même de poser une pierre. En simulant les chantiers, on peut anticiper des conflits (de structure ou d’espace) et éliminer les déchets avant la construction réelle​.

Les risques identifiés concernent surtout l’accès inégal à la bande passante et la sensibilisation aux problèmes de vie privée ou de sécurité des données dans le « métavers » de la construction.

7. L’effet élastocalorique

 

Dans un contexte d’urgence climatique, les technologies élastocaloriques émergent comme une alternative prometteuse aux systèmes de refroidissement traditionnels, énergivores et souvent polluants. Ces systèmes exploitent les propriétés de certains matériaux qui se réchauffent et se refroidissent lorsqu’ils sont déformés mécaniquement.

“Les systèmes élastocaloriques pourraient réduire jusqu’à 40% la consommation énergétique liée à la climatisation et à la réfrigération,” estime Jacques Martin, expert en efficacité énergétique. “Leur déploiement à grande échelle constituerait une avancée majeure pour atteindre nos objectifs climatiques.”

Les technologies élastocaloriques tentent d’y répondre avec beaucoup moins d’énergie. Les pompes élastocaloriques utilisent des matériaux métalliques spéciaux (alliages de nickel, titane, etc.) qui chauffent lorsqu’on les étire et refroidissent quand on relâche la contrainte​. En répétant sans cesse ce cycle de tension/détente, on obtient de la chaleur d’un côté et du froid de l’autre. L’avantage majeur est d’éliminer complètement l’usage de gaz réfrigérants (souvent polluants) : la WEF (World Economic Forum) note que cette approche peut « réduire drastiquement la consommation d’énergie » sans nuire à l’environnement​.

L’impact potentiel est double : d’une part, cela réduirait l’empreinte carbone des climatiseurs et réfrigérateurs, permettant des solutions de refroidissement plus abordables en pays chauds. D’autre part, cela peut élargir l’accès à la climatisation dans les régions avec peu d’électricité, améliorant le confort et la santé publique. Néanmoins, des obstacles techniques restent à franchir. Les matériaux doivent supporter des millions de cycles d’étirement sans se fatiguer​. Il faut aussi développer des systèmes pratiques (souvent hydrauliques) pour appliquer ces contraintes mécaniques efficacement.

8. Microbes capteurs de carbone

La lutte contre le changement climatique s’enrichit d’une nouvelle approche biologique : les microbes génétiquement modifiés capables de capturer efficacement le CO2 atmosphérique. Ces organismes transforment le dioxyde de carbone en composés utiles ou en biomasse, offrant ainsi une double solution.

Plusieurs installations pilotes sont entrées en service cette année, démontrant le potentiel de cette approche pour compléter d’autres méthodes de capture et stockage du carbone. Cette technologie, encore en développement, pourrait transformer les industries polluantes en sources de valeur, avec des applications dans plusieurs domaines.

Les microbes capteurs de carbone offrent plusieurs avantages et applications au-delà de la simple réduction du CO₂ atmosphérique. Cette approche représente un changement fondamental dans notre vision du CO₂ : d’un déchet problématique à une ressource exploitable. C’est cette double valeur (environnementale et économique) qui rend les microbes capteurs de carbone particulièrement prometteurs parmi les différentes stratégies de lutte contre le changement climatique.

L’avantage majeur est que cette technologie s’autofinance partiellement grâce à la production de composés commercialisables, contrairement à d’autres méthodes de capture et stockage qui représentent uniquement un coût pour les entreprises.

9. Alimentation alternative pour le bétail

Les protéines issues de cellules uniques, d’algues et de déchets alimentaires offrent une solution durable pour l’agriculture. Elles réduisent la dépendance aux cultures traditionnelles, diminuant l’impact environnemental, notamment les émissions de gaz à effet de serre, et répondant à la demande croissante de protéines face à une population mondiale en croissance.

L’élevage mondial requiert d’énormes ressources agricoles (notamment soja et maïs) pour nourrir les animaux. Pour réduire cet impact, des aliments alternatifs sont en développement : insectes (larves de mouche soldat noir, grillons), protéines issues de micro-organismes unicellulaires (levures, algues), ou même résidus alimentaires recyclés​. Ces nouvelles sources nutritives se présentent comme des substituts viables au soja et au poisson, tout en utilisant moins de terres agricoles.

D’un point de vue technologique et sanitaire, ces aliments apportent aussi une plus grande diversité nutritionnelle pour les animaux. Les insectes fournissent des protéines, l’huile d’algue apporte des acides gras essentiels, et certaines algues ou levures fournissent des minéraux. Cela peut améliorer la santé animale et la qualité des produits (viande, lait). De plus, plusieurs de ces alternatives s’avèrent moins coûteuses à produire : par exemple, la farine de larves de mouche est fabriquée à partir de déchets organiques (effluents agricoles, résidus de fruits) et réduit les besoins en poisson ou soja importé​.

10. Génomique pour les transplantations

Les avancées en édition génomique ouvrent de nouvelles perspectives pour les transplantations d’organes, domaine confronté à une pénurie chronique de donneurs. La xénotransplantation – transplantation d’organes animaux génétiquement modifiés vers des humains – connaît des progrès spectaculaires.

Au-delà de la xénotransplantation, d’autres approches comme la création d’organes en laboratoire à partir de cellules souches ou l’amélioration des organes disponibles par édition génétique progressent également rapidement.

Les enjeux restent toutefois sérieux. D’une part, ces procédures doivent franchir des étapes légales et éthiques. D’autre part, la question des médicaments immunosuppresseurs (pour éviter le rejet) et de l’acceptation par la société (questions religieuses, consentement aux xénogreffes) devra être traitée. En résumé, la génomique appliquée aux transplantations est une technologie porteuse d’espoir pour sauver des vies, mais son adoption généralisée demandera encore de la recherche et une régulation adaptée.

Comment la science prépare déjà le monde de demain ?

À l’aube de cette année 2024, ces dix technologies ne représentent pas simplement des avancées incrémentales, mais de véritables ruptures susceptibles de redéfinir des secteurs entiers de notre économie. Leur convergence promet de nous fournir de nouveaux outils pour affronter les défis majeurs de notre temps : changement climatique, sécurité alimentaire, transition énergétique et accès aux soins. Reste à voir comment entreprises, gouvernements et société civile s’empareront de ces innovations pour bâtir un avenir plus durable et équitable.

Source : Top 10 Emerging Technologies of 2024 – World Economic Forum

Voir aussi