L’accès à l’énergie en Afrique

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L’énergie est la clé du développement de l’Afrique. C’est sur elle que le continent construira son industrialisation. Le développement économique tout entier en bénéficiera ; de nouveaux emplois et de nouvelles perspectives émergeront pour des pans entiers de l’industrie. Une énergie fiable et durable est également indispensable pour assurer l’accès des populations aux services de base importants tels que les soins de santé et de l’eau potable.

Selon l’AIE, environ la moitié de la population totale de l’Afrique (548 millions de personnes) n’avait pas accès à l’électricité en 2020, dont plus de 80 % des habitants des zones rurales. Maurice, les  Seychelles, l’Afrique du Sud et les pays du nord du continent ont atteint un accès quasi-universel à l’électricité, tandis que d’autres, comme le Burundi et le Tchad, montrent des taux d’accès avoisinant les 10 %. Et près de deux tiers des pays africains affichent des taux d’accès inférieurs à 50 %.

Les problèmes les plus marquants du secteur de l’électricité en Afrique sont notamment les larges déficits d’investissement, la taille inefficace des systèmes électriques des pays, la capacité technique insuffisante, et les médiocres performances des compagnies électriques.

L’électrification de l’Afrique subsaharienne doit être traitée comme une nécessité.

L’électrification est un investissement à long terme qui jette les bases du développement. Les pays ayant une capacité financière suffisante doivent planifier et déployer l’électrification sans délai. L’électrification en Afrique doit mettre l’accent sur le renforcement des capacités économiques des communautés en tant que meilleur moyen d’accomplir des progrès de développement plus rapides et soutenables. L’électrification apporte aux micros, petites et moyennes entreprises des opportunités d’affaires dans des domaines tels que la coiffure, la restauration et la couture. L’électrification peut jouer un rôle crucial dans la création d’opportunités d’activités génératrices de revenus. 

Reconnaître que l’électrification est un investissement à long terme et une contribution nécessaire à la transformation économique.

Les plans visant à accroître l’accès ne doivent pas être évalués uniquement sur la base des avantages à court terme. Les pays africains ont sous-investi dans l’électricité, même si dans de nombreux pays, les rentes issues des ressources naturelles auraient pu constituer une source essentielle de financement de l’électrification. À court terme, les avantages de l’électrification ont peu de chances de couvrir ses coûts, mais à long terme, elle est un moteur clé de la transformation économique. Retarder l’électrification a un coût d’opportunité élevé, car le manque d’électricité entrave l’adoption de technologies modernes et diminue la qualité de la prestation de services tels que les soins de santé, l’éducation et autres services publics.

Lever les contraintes pesant sur la demande à tous les stades du processus d’électrification.

Le coût de la fourniture d’électricité est élevé et une part majeure des populations africaines sont incapables de payer des tarifs reflétant les coûts. À l’heure actuelle, le prix unitaire de l’électricité appliqué aux consommateurs de beaucoup de pays d’Afrique atteint plus de deux fois celui en vigueur dans des pays à haut revenu. Dans certains pays, tels que le Libéria, le coût de l’électricité par kilowattheure est le quadruple de celui des États-Unis. Dans certaines régions en Afrique, peu de ménages peuvent se permettre la consommation de subsistance de 30 kWh par mois aux tarifs actuels des services.

Aussi dans certains pays africains, les coûts de raccordement sont souvent trop élevés pour la plupart des ménages. Le coût total du raccordement est principalement lié aux coûts du compteur électrique et des poteaux.

Accorder la priorité à la fiabilité

La fiabilité est largement utilisée pour qualifier l’accès à une électricité stable, sans fluctuations de voltage, toujours disponible, et capable de soutenir l’utilisation d’appareils compatibles avec la tension du réseau. Les deux principaux risques pour la fiabilité sont les pannes (coupures de courant) et les baisses de tension. Le manque de fiabilité est élevé dans de nombreux pays africains. Un accès fiable à l’électricité est la base de toute économie moderne. La révolution numérique l’a rendu encore plus important. La fiabilité de la distribution d’électricité est un problème majeur en Afrique. La part des entreprises subissant des coupures de courant y est plus élevée que dans n’importe quelle autre région. 

Une majorité d’entreprises de la région utilisent des générateurs en tant que stratégie d’adaptation au manque de fiabilité de l’électricité. Les ménages et les entreprises restent privés d’électricité pendant plusieurs heures du jour ou de la nuit. Même lorsque le courant n’est pas coupé, les baisses de tension sont très fréquentes, limitant ainsi l’utilisation potentielle de l’électricité par les consommateurs. Les pannes persistantes, le manque de fiabilité de la fourniture de l’électricité a un impact significatif sur les entreprises, car elle limite leur production et la prestation des services. Les pannes de courant pèsent lourdement sur la productivité et la compétitivité des entreprises en Afrique.

Le bien-être des ménages et la qualité de vie sont également affectés. Un accès peu fiable à l’électricité nuit au bien-être des ménages. Les pannes fréquentes limitent l’aptitude des ménages à s’engager dans des activités productives, éducatives et récréatives nocturnes. Avec un approvisionnement régulier en électricité, les ménages peuvent augmenter leurs revenus en entreprenant le soir des activités productives, telles qu’une entreprise à domicile.

Bien que l’accès à l’électricité soit important, la fiabilité l’est encore plus pour l’obtention complète de l’impact de l’électrification. Car la mauvaise qualité de la fourniture entraîne des pertes économiques considérables en Afrique.

Mobiliser la demande

De nombreux facteurs influencent la demande et l’utilisation d’électricité. Parmi eux figurent les bas niveaux de revenu, les flux irréguliers de revenu et le manque de fiabilité du service de l’électricité. Une fois que le service est disponible, si l’adoption et la consommation sont trop faibles, le secteur peut ne pas être financièrement viable. Pour rendre l’expansion de l’électricité financièrement viable et encourager la participation du secteur privé au secteur de l’électricité, les taux d’adoption doivent être améliorés, de même que la consommation. Les contraintes liées à la demande doivent être des considérations essentielles pour les stratégies d’électrification dans la région.

Aussi, cibler et promouvoir l’utilisation productive afin que l’électrification accroisse les revenus des ménages, renforce leur capacité à payer, contribue à la viabilité financière des compagnies d’électricité grâce à une consommation accrue, et alimente en retour les finances publiques à travers les impôts en vue d’un réinvestissement. Cet objectif exige, cependant, de la fiabilité et la fourniture de facteurs complémentaires.

La technologie évolue et nécessite une réflexion dynamique

Des recherches considérables se concentrent dans le monde entier sur les énergies renouvelables, entraînant une réduction des coûts et une augmentation de la production. La technologie et l’innovation influent sur le secteur de l’électricité, tout comme elles l’ont fait pour d’autres secteurs de l’économie.

L’Afrique dispose d’abondantes ressources d’énergie renouvelable. Mais seulement 20 % de la capacité totale de production d’électricité installée en Afrique en 2019 était basée sur des sources renouvelables. Si l’hydroélectricité représente toujours la plus grande part de la capacité installée d’énergie renouvelable en Afrique, sa part relative est passée de 92 % en 2010 à 67 % aujourd’hui, dans la mesure où les autres technologies renouvelables sont devenues plus compétitives. En plus de l’énergie solaire, de nombreux pays africains ont à leur disposition d’autres ressources énergétiques renouvelables (éolienne, hydraulique, géothermique) qui peuvent être utilisées pour produire de l’électricité à des prix compétitifs.

Les solutions solaires hors réseau 

Pour de nombreuses communautés, les solutions hors réseau ont suscité l’espoir d’accéder plus rapidement à l’électricité. Elles sont toutefois principalement centrées sur l’éclairage et la recharge des téléphones portables, alors que la nécessité est d’améliorer les moyens d’existence économiques. 

Attirer l’investissement dans le secteur en Afrique

En Afrique, l’accès à l’électricité est entravé par la capacité financière des compagnies électriques à répondre à la demande et par la capacité de paiement des ménages. Dans un marché fonctionnant bien, l’offre et la demande se rencontrent autour d’un prix satisfaisant les producteurs et les consommateurs.

Dans la région, les politiques réglementaires de l’électricité varient, avec un effet négatif sur l’offre. Certains pays ont séparé la production du transport et autorisent les producteurs d’électricité indépendants ; d’autres ont un monopole d’État. Selon un rapport de 2016, des producteurs d’électricité indépendants opèrent dans 18 pays africains, représentant 13 % de la capacité totale de production régionale, et davantage de pays devraient envisager de faire appel à l’investissement privé pour étendre la fourniture d’électricité.

Selon le dernier rapport RISE de 2016, 17 pays africains sur 35 n’ont aucun plan d’électrification officiellement adopté. Un cadre réglementaire approprié est nécessaire pour attirer l’investissement dans tous les domaines du secteur (production, transport, infrastructure, distribution, et gestion opérationnelle) afin de combler le déficit lorsque le financement public est insuffisant.

En outre, la population de la plupart des pays africains étant nombreuse et jeune, la création d’emplois est une priorité absolue. Le chômage est identifié comme le défi le plus pressant sur lequel les pouvoirs publics doivent se concentrer. Associer le déploiement de l’électrification à la création d’emploi est une excellente façon d’attirer l’investissement.

L’Afrique a un potentiel énorme en matière de ressources énergétiques suffisant pour atteindre une couverture quasi-universelle. Et certains pays africains l’ont compris. Le développement de méga initiatives telles que le barrage du Grand Inga en RDC, le grand barrage de la Renaissance éthiopienne, le projet éolien Turkana au Kenya, ainsi que la centrale solaire de Ouarzazate au Maroc le prouve.

Références :
– Moussa P. Blimpo et Malcolm Cosgrove-Davies. 2020. Accès à l’électricité en Afrique subsaharienne : Adoption, fiabilité et facteurs complémentaires d’impact économique. Collection Africa Development Forum. Washington, DC : Banque mondiale. Doi:10.1596/978-1-4648-1488-4. Licence : Creative Commons Attribution CC BY 3.0 IGO
– La transition vers les énergies renouvelables en Afrique : Renforcer l’accès, la résilience et la prospérité. Banque de développement KfW, Septembre 2020

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