Qui est Mohammed Dewji : milliardaire tanzanien et CEO de MeTL Group

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Mohammed “Mo” Dewji est né le 8 mai 1975 à Singida, en Tanzanie, dans une famille d’origine indienne, issue de la communauté chiite duodécimaine dont les ancêtres ont quitté le Gujarat à la fin du XIXe siècle pour s’installer comme commerçants en Afrique de l’Est. Malgré des débuts modestes — il naît dans une maison en terre battue, assisté d’une sage-femme du quartier — il grandit dans un environnement familial soudé, où l’esprit d’entreprise est central. Son père, Gulamabbas Dewji, transforme une petite boutique familiale en une société d’import-export prospère, posant les bases du futur conglomérat MeTL.

Après une scolarité à Arusha puis à l’International School of Tanganyika à Dar es Salaam, Mohammed Dewji poursuit ses études secondaires aux États-Unis, d’abord en Floride puis dans le New Jersey. Il intègre ensuite la prestigieuse Université de Georgetown à Washington, où il obtient en 1998 un diplôme en commerce international et finance, avec une mineure en théologie. Diplômé, il rentre en Tanzanie pour rejoindre l’entreprise familiale, dont il va radicalement transformer le destin.

L’ascension de MeTL Group

À son retour en Tanzanie, Mohammed Dewji prend rapidement les rênes de l’entreprise familiale, Mohammed Enterprises Tanzania Limited (MeTL). À l’époque, MeTL est essentiellement une société de négoce, active dans l’import-export de produits de base. Mais sous l’impulsion de Dewji, la société va connaître une transformation spectaculaire.

Profitant des vagues de privatisations des années 1990 et 2000, Dewji acquiert plusieurs entreprises publiques en difficulté, notamment dans le secteur textile, la production d’huile, ou encore la minoterie. Il restructure ces actifs, investit dans la modernisation des équipements et intègre progressivement de nouveaux secteurs : agro-industrie, logistique, télécommunications, finance, assurance, énergie, grande distribution… Cette diversification rapide est l’une des clés du succès de MeTL.

En quelques années, MeTL passe d’une entreprise familiale à un véritable conglomérat multinational. Le groupe opère aujourd’hui dans plus de 10 pays africains, principalement en Afrique de l’Est et australe, et emploie plus de 28 000 personnes. Son chiffre d’affaires dépasse désormais le milliard de dollars. Dewji mise sur une vision industrielle panafricaine, axée sur la création de chaînes de valeur locales et l’intégration économique du continent africain.

Jeunesse et fortune

Mohammed Dewji fait partie des rares milliardaires africains en dollars, selon Forbes, et figure en 2025 à la 12e place du classement des grandes fortunes africaines avec une richesse estimée à 2,2 milliards de dollars. Ce statut exceptionnel s’explique par la croissance explosive de MeTL Group et une stratégie de diversification tous azimuts.

Dewji a bâti sa fortune en profitant habilement des privatisations des années 1990 et 2000 en Tanzanie, rachetant à bas prix des entreprises publiques en difficulté, puis en les restructurant pour en faire des pôles de profit. Sous sa direction, MeTL est passé d’un chiffre d’affaires de 30 millions de dollars à plus de 1,5 milliard de dollars entre 1999 et 2018, et continue de croître à l’échelle continentale.

Mohammed Dewji est également le premier Tanzanien à avoir fait la couverture de Forbes, symbole de sa reconnaissance internationale et de son rôle de modèle pour la jeunesse africaine. Il incarne ainsi une nouvelle génération d’entrepreneurs ambitieux et résolument tournés vers la transformation du continent.

Engagement politique et social

Mohammed Dewji ne s’est pas limité au monde des affaires : il a aussi marqué la vie politique et sociale de la Tanzanie. En 2005, il est élu député au Parlement pour le parti Chama Cha Mapinduzi (CCM), représentant sa ville natale de Singida. Il y siège pendant dix ans, jusqu’en 2015, avant de choisir de se consacrer pleinement à ses activités entrepreneuriales et philanthropiques. Durant son mandat, il s’engage activement pour le développement local et l’amélioration des conditions de vie de ses concitoyens.

Côté philanthropie, Dewji fonde la Mo Dewji Foundation, qui finance de nombreux programmes dans l’éducation, la santé et l’autonomisation des jeunes. Il fait partie du Giving Pledge, rejoignant ainsi les plus grands philanthropes mondiaux en s’engageant à donner plus de la moitié de sa fortune à des œuvres caritatives. Très attaché à l’idée d’une Afrique portée par ses propres forces, il milite pour un développement inclusif et durable, et multiplie les discours en faveur d’une Afrique forte, innovante et indépendante.

Enlèvement en 2018 et impact médiatique

Le 11 octobre 2018, Mohammed Dewji est enlevé à Dar es Salaam, alors qu’il se rend à sa séance de sport matinale au Colosseum Hotel. Des hommes armés surgissent, tirent en l’air et le forcent à monter dans un véhicule, sous les yeux de témoins choqués. L’enlèvement de l’homme d’affaires le plus en vue de Tanzanie déclenche une mobilisation sans précédent : la police lance une vaste chasse à l’homme, les médias locaux et internationaux suivent l’affaire de près, et l’opinion publique s’inquiète pour sa sécurité.

Dewji restera détenu pendant dix jours, dans des conditions éprouvantes. Il est maintenu les yeux bandés, menacé à plusieurs reprises, et subit une véritable torture psychologique. À bout, il confie plus tard avoir demandé à ses ravisseurs de le tuer, tant la détresse était grande. Finalement, il est relâché sans qu’aucune rançon ne soit versée, abandonné dans un champ à proximité du lieu de son enlèvement. Les autorités n’ont jamais pu établir clairement le mobile du crime, même si la piste d’une tentative d’extorsion reste la plus probable.

Cet événement bouleverse profondément la vie de Mohammed Dewji. Après sa libération, il remercie publiquement la police et tous ceux qui ont prié pour lui. Il se retire quelque peu de la scène médiatique et renforce considérablement sa sécurité personnelle. Son enlèvement, très médiatisé, a eu un retentissement continental, illustrant la vulnérabilité des grandes fortunes africaines face à l’insécurité, même dans des pays réputés stables comme la Tanzanie.

Vision économique et leadership

Mohammed Dewji incarne une vision entrepreneuriale résolument panafricaine, axée sur l’investissement local, la création de valeur ajoutée et l’autosuffisance du continent. Pour Dewji, l’avenir du continent repose sur la transformation de ses ressources naturelles et la montée en puissance de chaînes de valeur locales, en particulier dans l’agro-industrie. Il ambitionne de faire de la Tanzanie, et plus largement de l’Afrique, un grenier alimentaire mondial, en investissant massivement dans la mécanisation agricole et l’intégration verticale des filières.

Dewji défend un capitalisme inclusif, où les grands groupes comme MeTL servent de locomotive à tout un écosystème de PME, de fournisseurs et de sous-traitants locaux. Il considère que l’Afrique doit sortir de la dépendance à l’aide internationale et miser sur l’économie de marché et l’investissement productif pour atteindre l’autonomie et la prospérité.

En tant que leader, Dewji se distingue par son dynamisme et sa proximité avec la jeunesse africaine. Très actif sur les réseaux sociaux, notamment Twitter, il partage régulièrement ses réflexions sur l’économie, l’entrepreneuriat et l’avenir du continent. Il intervient dans de nombreux forums internationaux, comme le World Economic Forum ou l’ONU, où il promeut l’attractivité de l’Afrique et encourage l’innovation locale. Son style de leadership accessible, fait de lui une figure emblématique de la nouvelle génération d’hommes d’affaires africains.

Défis et critiques

Si la réussite de Mohammed Dewji force l’admiration, elle suscite aussi des interrogations et des critiques. Sa proximité avec le pouvoir politique tanzanien, notamment durant les périodes de privatisation massive, alimente le débat sur la transparence des acquisitions réalisées par MeTL Group. Certains observateurs estiment que son ascension fulgurante a été facilitée par des liens étroits avec les autorités, ce qui soulève des questions sur l’équité des processus de privatisation et la concentration du capital dans les mains d’un petit nombre d’acteurs économiques.

Enfin, Dewji doit composer avec la pression médiatique et les risques liés à sa notoriété. Son enlèvement en 2018 a révélé la vulnérabilité des grandes fortunes africaines face à l’insécurité, même dans des environnements réputés stables comme la Tanzanie. Depuis cet épisode, il a choisi de se montrer plus discret, tout en poursuivant ses activités économiques et philanthropiques.

Une source d’inspiration

À travers son parcours, il incarne la réussite d’une nouvelle génération de leaders africains qui osent transformer le continent par l’innovation, l’investissement et la persévérance. Dewji n’est pas seulement un capitaine d’industrie : il est devenu un modèle et une source d’inspiration pour la jeunesse africaine, prouvant que le succès mondial est accessible à ceux qui osent voir grand et agir localement.

Son influence dépasse largement les frontières de la Tanzanie. En tant qu’intervenant dans de grands forums internationaux comme le World Economic Forum ou l’ONU, il porte la voix d’une Afrique ambitieuse, ouverte sur le monde mais déterminée à bâtir sa propre prospérité. Dewji encourage la diaspora et les jeunes entrepreneurs africains à investir sur le continent, à miser sur la production locale et à croire au potentiel du marché africain.

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